Il était une fois... La fabrique de papier fantaisie

Une spécialité montrougienne

La fabrique de papiers de fantaisie de l’avenue Henri Ginoux est le témoin de l’une des activités phare de Montrouge au siècle dernier, celle de l’industrie du papier : en 1905, la commune compte trois imprimeries, une fabrique de reliures et d’albums de cartes postales, une usine de machines à imprimer et une autre de zincs lithographiques. Fondée en 1836 à Paris, rue de Turbigo (dans le 1er arrondissement), la société Putois frères et Cie transfère ses usines de fabrication de papiers de fantaisie à Montrouge dès 1852. Les divers bâtiments implantés sur le terrain (occupant les numéros 96-104 rue de Bagneux, actuelle avenue Henri Ginoux, 2-10 avenue Verdier et 25-27 rue Victor Hugo, sur une superficie de plus de 4 800 mètres carrés) sont à usage industriel, à l’exception de l’immeuble collectif d’habitation à l’angle de l’avenue Verdier, occupé par le personnel de la société.

Des papiers de fantaisie

En 1905, la production de la manufacture, qui occupe une soixantaine d’ouvriers – et jusqu’à 89 en 1945 –, comprend la fabrication des papiers de fantaisie pour la reliure, la papeterie, les cartonnages, l’impression et le paquetage des produits alimentaires. L’une de ses spécialités est la fabrication des papiers marbrés à destination des relieurs, d’après le procédé suivant : dans un bain d’eau, de gomme et de lichen est dispersée une couleur de base, sur laquelle les couleurs de premier plan sont déposées et étirées à l’aide d’un râteau ; le papier est ensuite posé à la surface du bain préparé et s’imprègne alors des teintes mêlées en un motif imitant celui du marbre. Depuis la fin du XIXe siècle, l’usine est aussi l’un des principaux fournisseurs de papier couché pour les manufactures de tabac, comme l’atteste la Direction générale du Service d’Exploitation Industrielle des Tabacs et des Allumettes (SEITA).

Au 96-98 rue de Bagneux

L’immeuble encore visible aujourd’hui, au 96-98 de l’actuelle avenue Henri Ginoux (ancienne rue de Bagneux), a été conçu en 1911 par l’architecte Charles-Ernest Lozouet. Il s’agit de l’une des premières réalisations à intégrer à une ossature en béton un remplissage de briques de parement – après-guerre, ce type de construction remplacera les structures en bois puis en métal. La bichromie atténue ainsi la sévérité des volumes et souligne les ouvertures de la façade quadrillée et les angles arrondis, le tout contrastant avec le soubassement en meulière. L’ossature en béton armé a également permis la superposition des ateliers sur deux étages, dans un secteur où l’urbanisation était déjà dense. En façade, l’inscription faite de décors en céramique est encore lisible. Réhabilité entre 1998 et 2001 par l’architecte Arnaud Fougeras-Lavergnolle, l’immeuble abrite désormais trois locaux d’activités et onze logements.

Des locaux aujourd’hui disparus

Régulièrement agrandie et modifiée au gré du développement de la société, l’usine comportait notamment dans la cour des appentis, une verrière, un bâtiment en tôle et un baraquement en béton qui abritaient le processus de traitement du papier. Les années 1950 verront, dans un souci de modernisation, l’aménagement de locaux, de bureaux, d’ateliers, de magasins et de dépôts de papiers. Puis, à la suite d’un sinistre en 1959, la société doit reconstruire une partie de ses locaux, mais elle connaît alors ses dernières heures. Le 2 décembre 1965, la déchéance de l’autorisation d’exploiter un atelier de fabrication de vernis à l’alcool est prononcée par le préfet de police de la Seine, suite à la non exploitation de ce dernier pendant plus de deux ans. En 1986, commencera la démolition de certains bâtiments à usage de bureaux et de locaux d’activités, notamment au 102 rue de Bagneux et avenue Verdier, la parcelle ayant été divisée en trois lots (dès 1971, certains terrains sont passés aux mains de la Société Civile Bagneux Verdier).